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histoire de la conservation
• Grèce Antique, Platon : le Critias propose une vision du monde où la nature forme un tout cohérent, structuré et interconnecté. L’idée centrale est que chaque élément de la nature a un rôle dans l’équilibre global → fable écologique avant l’heure et 1ère vision systémique de la nature en philosophie occidentale.
• Inde, Empereur Ashoka (vers 250 av. n. è.) : édits gravés sur pierre évoquant la protection des animaux
• Du Moyen-Age au 19ème siècle - vision utilitariste de la nature :
• Nature à domestiquer pour servir les besoins de l’humanité → défrichements, mise en culture des forêts, assèchement des marais, etc.
• Vision judéo-chrétienne : terre confiée à l’Homme pour qu’il la fasse fructifier
• Romantisme & naturalisme : fascination pour la nature sauvage, célébrée par la peinture, la
littérature, puis la photographie → nature perçue comme sublime, mystérieuse et spirituelle, puis comme objet d’observation attentive et rigoureuse
premiers mouvements de protection
• En Europe : des artistes comme les peintres de Barbizon (1830) inspirent la création de « séries artistiques » → premiers espaces naturels juridiquement protégés
• Aux États-Unis : « esprit pionnier » → nature valorisée pour son immensité (grands espaces vierges à explorer et « conquérir »), réactions de penseurs (Muir, Tocqueville) face à l’expansion coloniale
Influence des arts dans la naissance des idées de protection et de prise de conscience écologique
Enjeux socio-politiques de la conservation
Le monde est un patchwork de cultures, de normes et d’intérêts
• La conservation est un phénomène social porteur de valeurs implicites
• Elle peut prendre une dimension politique importante et peut entrer en tension avec d’autres priorités (croissance économique, souveraineté énergétique, etc.)
• Une conservation efficace nécessite l’implication de nombreux acteurs (scientifiques, États, ONG, entreprises, citoyen·nes, etc.)
-> Besoin d’arguments éthiques pour justifier la conservation dans un monde de conflits de valeurs et d’intérêts divergents
Deux grands types de valeur accordée la nature :
• Valeur instrumentale (utilité pour l’humain) → approches anthropocentrées (services écosystémiques, justice intergénérationnelle)
• Valeur intrinsèque (valeur en soi) → approches non- anthropocentrées → élargissement de la communauté morale aux entités écologiques (respect de ce que la nature a mis des millions d’années à « créer »)
La conservation se heurte à plusieurs limites :
• Démographie : pression croissante sur les ressources
• Recherche de profit à court terme : destruction rapide des milieux
• Pauvreté : déclaration du Millénaire de l’ONU identifie la lutte contre la pauvreté comme un levier clé pour la conservation
—> Le déséquilibre entre les responsabilités environnementales et les vulnérabilités sociales pose un enjeu majeur de justice dans les politiques de conservation
doit-on accorder des droits à la nature ? Faut-il inscrire le crime d’écocide en droit pénal international au même titre que les crimes contre l’humanité ?
La Belgique intègre le crime d’écocide dans son Code pénal en 2024 : avancée législative pionnière en Europe. Mais… quelques limites :
• Exigence d’intentionnalité stricte
• L’environnement est une compétence majoritairement régionale → application restreinte aux compétences fédérales (mer du Nord, radiations, actes non localisables en Belgique) !
Article 94 §1er : « Le crime d’écocide consiste à commettre délibérément, par action ou par omission, un acte illégal causant des dommages graves, étendus et à long terme à l’environnement en sachant que cet acte cause de tels dommages, pour autant que cet acte constitue une infraction à la législation fédérale ou à un instrument international qui lie l’autorité fédérale ou si l’acte ne peut pas être localisé en Belgique »
Valeurs implicites souvent convoquées en conservation :
• Stabilité : idée qu’un écosystème doit rester inchangé, or la nature évolue sans cesse → intégrer notions de non-équilibre, de dynamiques, de changement permanent dans la conservation
• Sécurité : volonté d’éviter les risques perçus (ex. incendies, or incendies périodiques font partie du cycle de régénération naturelle de nombreux écosystèmes forestiers)
« Pour mieux protéger la nature, il faut mieux comprendre la psychologie humaine »
• Principe de précaution : agir prudemment face à un risque incertain si l’inaction peut causer des dommages graves.
Principe souvent détourné en exigence de certitude absolue par crainte de conséquences imprévues → peut conduire à l’immobilisme, même lorsque l’inaction est plus risquée que l’action (ex. retarder la réintroduction d’une espèce clé par précaution, alors que son absence perturbe déjà l’écosystème)
Exemple de tension éthique : le cas du loup
• Présent dans toute l’Europe jusqu’au 19ème siècle
• Perçu comme une menace → battues & primes à l’abattage
• Dernier loup belge tué vers 1890
• Retour naturel confirmé en 2018 (Hautes-Fagnes)
• Aujourd’hui : 4 meutes + 1 couple installé, ≃ 25 individus recensés + ≃ 30 loups dispersants observés ponctuellement
• Prédateur clé : régule les pops d’ongulés sauvages (→ favorise la régénération forestière), laisse des carcasses accessibles à d’autres sp.
• Conflits de valeurs : sécurité, protection du bétail, intérêts socio-économiques vs. conservation, biodiversité, droit d'exister
• Affects puissants : peur, fascination, attachement symbolique
Trois grandes modalités d’action (approches de conservation) :
• Gestion ciblée : intervenir de façon ciblée pour maintenir ou favoriser certaines espèces ou habitats
• Restauration écologique : vise à ramener un écosystème dégradé vers un état de référence antérieur (structure, composition, fonctions)
• Libre évolution (non-intervention) : laisser un milieu évoluer sans intervention humaine, même après perturbation
Ces modalités ne sont pas mutuellement exclusives : certains projets de conservation combinent différentes approches (ex. réserve avec zone de non- intervention au centre et zones périphériques gérées autour)
conservation in situ : stratégies courantes
➢ Création de réserves naturelles ou de parcs nationaux
➢ Protection légale des espèces menacées (statuts de protection, interdiction de chasse, de capture)
➢ Gestion écologique des habitats : adaptation des pratiques (ex.
fauche, gestion de l’eau, contrôle des EEE) pour maintenir ou restaurer les conditions favorables à la biodiversité locale
• Espèces particulières utilisées en in situ :
➢ Espèce phare/emblématique : attire le soutien public (ex. panda)
➢ Espèce parapluie : sa protection profite à d’autres espèces (ex. ours brun)
➢ Espèce clé de voûte : rôle disproportionné p/r abondance (ex. castor)
conservation in situ
• Approche prioritaire
• Conservation d’espèces dans leur milieu naturel, où elles peuvent continuer à évoluer naturellement et maintenir leurs interactions écologiques
conservation ex situ
• Approche complémentaire ou de dernier recours
• Conservation d’espèces en dehors de leur milieu naturel lorsque leurs populations sauvages sont trop réduites ou fragmentées pour garantir leur survie à long terme
conservation ex situ : principaux outils
➢ Parcs zoologiques : élevage en captivité, programmes EEP pour maintenir des populations viables et génétiquement diversifiées d’espèces menacées, avec perspective éventuelle de réintroduction➢ Aquariums : sauvetage de vertébrés marins, conservation d’espèces aquatiques menacées
➢ Jardins botaniques: conservation de ≃ 30 % de la flore mondiale, programmes de recherche, éducation environnementale
➢ Stockage génétique : banques de semences et « zoos congelés » (sperme, ovocytes, embryons de > 1000 sp.)
conservation ex situ : limites et enjeux éthiques
➢ Captivité = conditions artificielles → comportement, reproduction, nutrition altérés
➢ Dimension commerciale : acquisition d’espèces
➢ Réintroduction rare : la majorité des individus nés en captivité ne sont jamais réintroduits
repeuplement
Ajouter des individus (captifs ou sauvages) à une population déjà existante pour augmenter sa taille et renforcer sa diversité génétique ≃ « sauvetage génétique »
réintroduction
Relâcher des individus dans un site écologiquement adapté où l’espèce a disparu localement (mais faisait partie de son aire de répartition historique)
introduction assistée
Déplacer une espèce en dehors de son aire de répartition historique vers un habitat jugé écologiquement adapté, pour assurer sa survie face à une menace (perte de l’habitat historique, changement climatique, etc.)
repeuplement : Ex - renforcement génétique des populations sauvages de vipère commune (Vipera berus) pour contrer une dépression de consanguinité
• Population isolée à Smygehuk sur une bande côtière de < 1 km²
• Déclin observé dès les années 1960 : consanguinité, malformations, mortalité néonatale
• 1992 : introduction de 20 mâles génétiquement diversifiés issus de pops voisines
—> Résultats après 4 ans : rebond du recrutement de jeunes adultes, baisse des malformations, augmentation de la diversité génétique
réintroduction : réintroduction du grand corbeau (Corvus corax) en Belgique
• Disparu de Belgique début 20ème siècle (campagnes d’éradication et perte d’habitat)
• Programme de réintroduction : 50 individus relâchés entre 1973 et 1980
• 1980 : 1er couple nicheur (vallée de la Semois)
• 2010 : entre 50 et 100 couples
• Aujourd’hui : plusieurs centaines de couples, présence croissante à Bruxelles (avec 1ères nidifications récentes)
• Rôle écologique important : charognard et omnivore → participe au nettoyage des carcasses, à la régulation de petites espèces animales et à la dispersion des graines
introduction assistée : introduction assistée du Torreya de Floride (Torreya taxifolia)
• Conifère endémique du nord de la Floride et du sud de la Géorgie
• Menacé d’extinction en raison de maladies fongiques, de la perte d'habitat et du changement climatique
• Déplacé vers des régions plus au nord aux États-Unis par les Torreya Guardians (mouvement citoyen → conservation militante
face à l’inaction des institutions)
• Enjeux : risque d’invasivité, de perturbation des écosystèmes locaux, succès variable selon les sites
réensauvagement : principes clés
➢ Restauration des processus écologiques : remettre en place des fonctions naturelles (ex. dynamique des sols et des cours d’eau, régimes de perturbation, etc.)
➢ Réintroduction d’espèces clés, souvent disparues localement (ex. grands herbivores, prédateurs)
➢ Très grandes surfaces connectées permettant les déplacements, la recolonisation, et le brassage génétique
➢ Autonomie des écosystèmes : postulat que la nature atteint une biodiversité et une résilience maximales lorsqu’elle peut évoluer librement dans le temps
➢ Long terme : évolution naturelle sans contrôle sur l’état final (>< état cible en conservation classique)
conservation transnationale
De nombreuses espèces traversent plusieurs pays au cours de leur cycle de vie : oiseaux migrateurs, mammifères marins, chauves-souris, poissons (ex. anguilles, saumons), etc.
La conservation des espèces migratrices exige la préservation de tous les habitats utilisés au cours de leur cycle de vie (alimentation, reproduction, repos, hivernage)
è Besoin d’une coordination transnationale pour garantir leur protection sur l’ensemble de leur aire de répartition
aire protégée
zones terrestres ou marines dédiées par la loi et gérée pour la protection de la biodiversité et des ressources naturelles et culturelles associées (selon UICN)
typologie aires protégées
• Ia– Réserves naturelles intégrales (aucune activité humaine sauf recherche scientifique)
• Ib– Zones de nature sauvage (grands espaces sans infrastructures permanentes mais ouverts au public)
• II– Parcs nationaux (conservation + activités récréatives contrôlées)
• III– Monuments naturels (ex. formations géologiques)
• IV– Aires de gestion d’espèces ou d’habitats (interventions régulières nécessaires)
• V– Paysages protégés (aires où l’interaction durable entre l’humain et la nature a créé un paysage riche en biodiversité et à valeur culturelle/traditionnelle)
• VI – Aires protégées avec usage durable des ressources (ex. récolte de produits forestiers)
liste verte
Outil d’évaluation international de la qualité de gestion des aires protégées
• Basé sur des critères de gouvernance équitable, de planification efficace, de gestion adaptative et de résultats mesurables
—> Encourage l’amélioration continue des aires protégées
Aires terrestres protégées
A priori, + une réserve est grande, + elle est efficace (+ grande diversité d’habitats et d’espèces). MAIS… se concentrer sur une seule grande zone peut poser des difficultés de gestion (surveillance, gouvernance) et accroître la sensibilité à des perturbations localisées (ex. incendies, épidémies, etc.)
Débat classique en conservation : « SLOSS » – Vaut-il mieux une grande réserve ou plusieurs petites ? Dépend du type d’espèces ciblées et de la possibilité de connecter les petites réserves ! Dans les faits, la taille des réserves est souvent régie par l’espace disponible / la volonté politique
Les aires protégées fonctionnent comme des « îles » écologiques → théorie de la biogéographie insulaire. La richesse spécifique dépend :
• de la superficie (↓ extinction)
• de l’isolement (↓ immigration)
Forme compacte à bords réduits >> forme allongée exposée aux pressions externes
Aires marines protégées (AMP)
Rôle : protection des écosystèmes vulnérables et renouvellement des stocks halieutiques → préservation des zones de frai (reproduction), d’alimentation et des refuges contre la surpêche
• Taille de la réserve ≥ aire de déplacement des adultes et ≥ 2× distance moyenne de dispersion larvaire (→ maximise recrutement)
• Espacement entre réserves adapté à la dispersion larvaire et aux courants marins
AMP fixes
coordonnées géographiques stables → protègent des sites précis (ex. récifs coralliens, Emperor Seamount Chain)
AMP dynamiques
pas de limites géographiques permanentes, ajustées en temps réel selon des critères biologiques ou océanographiques (migrations, fronts de température, courants, concentration en chlorophylle) → protègent des phénomènes mobiles (ex. corridors migratoires du thon rouge de l’Atlantique)
aire protégées en Belgique
• Conservation = compétence régionale depuis 1980 → approches/outils varient selon régions
• ≃ 13 % du territoire classé en sites Natura 2000 (réseau européen)
• Réserves naturelles intégrales (catégories Ia–Ib). Ex. : 5 zones en Forêt de Soignes, inscrites au patrimoine mondial de l’UNESCO (aucune intervention : maintien des vieux arbres, bois mort non exporté)
• Parcs nationaux (catégorie II). Aucun jusqu’à récemment ! Six projets labélisés « parcs nationaux » en 2023 : Vallée de la Semois, Entre-Sambre-et-Meuse, Hoge Kempen, Bosland, Schelde Delta & Brabantse Wouden
• Paysages protégés (catégorie V). Ex. : parc naturel des Deux Ourthes (agriculture, écotourisme, villages intégrés)
• Aires avec usage durable (catégorie VI). Ex. Projet Nassonia (St- Hubert, Ardennes) : forêt-laboratoire mêlant gestion adaptative, conservation et expérimentation