développement de l’enfant
(PSYDEV24)
Cours 5.
Le cœur du système théorique piagétien
Ramiro Tau ramiro.tau@unine.ch
21 mars 2024
Questions sur la méthode :
Cettestratégiecomportetrois types de questions :
-les questions d'exploration : destiné à connaître le point de vue spontané
du sujet sur un problème ou un phénomène
-les questions de justification : destiné à légitimer le point de vue proposé, à travers la demande d'arguments qui l'expliquent
-les questions de contre-argumentation : Elle consiste à proposer au sujet un
argument contraire, pour déterminer la stabilité de ses propres arguments. Pour éviter l'effet d'autorité, notamment avec les enfants, on fait généralement référence aux arguments d'un autre enfant hypothétique, mais jamais à l'avis de la personne chargée de l'entretien
“La méthode clinique-critique est un procédé par lequel le chercheur interagit dialectiquement avec des enfants, des adolescents ou des adultes, de manière à rassembler des informations, qui, toutes ensemble, vont permettre à ce chercheur de répondre à la question qu’il se pose” (Ducret, 2004, p.2).
L’interprétation des réponses des enfants
Piaget, J. (1926/1947). Intruduction. Les prblèmes et les méthodes. Dans La représentation du monde chez l'enfant (pp. 5-30). Payot.
Cette méthode a permis à Piaget d'obtenir des données empiriques et d'éviter
l'observation pure ou naïve.
En effet, de nombreux enfants changent d’avis après avoir été confrontés à un contre- argument. En d’autres termes, il s’agit d’une méthode destinée à accéder aux connaissances d’un sujet.
Mais quels sont les concepts théoriques que Piaget utilise pour expliquer le
développement des connaissances ? La méthode clinique semble capter la
connaissance à un moment précis, et non son évolution. Comment s’explique la genèse de la connaissance ? Comment passer de la « photo » au « film », et surtout comment expliquer le mouvement des images dans le film.
Pour répondre à cette question, nous devons explorer certaines des notions centrales de la théorie.
Concepts clefs de la théorie: les schèmes
Les schèmes sont les unités de base de l’activité intelligente. Le schème est
« l'ensemble structuré des caractéristiques généralisables de l'action ».
Ils correspondent à ce qui est transposable d’une situation à l’autre (ce qui est
commun aux répétitions d’une action).
Les schèmes se complexifient progressivement, notamment en se coordonnant les uns les autres.
Par exemple, coordination du schème de préhension et du schème de traction
pour attraper un objet éloigné de lui en tirant sur une couverture.
La nature des schèmes évolue avec les capacités de l’enfant : schèmes d’action,
schèmes conceptuels, schèmes logiques.
Concepts clefs de la théorie: l’assimilation
L’assimilation est un processus par lequel le sujet appréhende un objet avec ses
structures de connaissance actuelles. L’assimilation intègre des éléments nouveaux dans les structures existantes de l’intelligence (c'est-à-dire les schèmes d'action).
“On peut appeler ‘assimilation’ l’action de l’organisme sur les objets qui l’entourent,
en tant que cette action dépend des conduites antérieures portant sur les mêmes
objets ou d’autres analogues. En effet, tout rapport entre un être vivant et son milieu présente ce caractère spécifique que le premier, au lieu d’être soumis
passivement au second, le modifie en lui imposant une certaine structure propre. (…) L’assimilation mentale est donc l’incorporation des objets dans les schèmes de la conduite, ces schèmes n’étant autres que le canevas des actions susceptibles
d’être répétées activement. »
Piaget, J. (1947/1967). La psychologie de l’intelligence (p.14). Armand Collin.
Concepts clefs de la théorie: l’accommodation
L’accommodation est un processus par lequel le sujet modifie ses structures de connaissance (les schèmes) en fonction des aspects particuliers de l'objet qui offrent une résistance à l'assimilation.
“ Réciproquement, le milieu agit sur l’organisme. (…) étant entendu que l’être vivant
ne subit jamais telle quelle la réaction des corps qui l’environnent, mais qu’elle modifie simplement le cycle assimilateur en l’accommodant à eux
Psychologiquement, on retrouve le même processus en ce sens que la pression des choses aboutit toujours non pas à une soumission passive, mais à une simple
modification de l’action portant sur elles. »
Piaget, J. (1967). La psychologie de l’intelligence. Paris, Armand Collin (1ère édition, 1947). P.14
-L'adaptation est la conséquence de l'équilibre entre assimilation et accommodement.
-L'équilibre entre les mécanismes d'intégration et d'ajustement conduit à l'adaptation d'un organisme ou d'un sujet à son environnement, car il est capable de préserver le cycle des échanges d'assimilation et d'accommodation avec les objets.
-Piaget distingue une adaptation organique et une adaptation fonctionnelle (comme l'adaptation intelligente)
-L'organisation est la contrepartie interne de l'adaptation. C'est le processus par lequel l'équilibre entre assimilation et équilibration conduit à une plus grande coordination des schémas entre eux.
-Les processus d’assimilation et d’accommodation sont complémentaires. Ils constituent les deux pôles du processus d’équilibration.
-L’équilibration est un processus d’auto-régulation qui repose sur les compensations actives du sujet aux modifications extérieures.
-Les échanges entre l’individu et son milieu visent non seulement un état d’équilibre, mais un état de meilleur équilibre. Le déséquilibre, ou la variation perturbatrice du milieu, est donc central dans le développement.
Piaget parle d'équilibration et non d'équilibre. Car l’équilibre suppose que la perte d’équilibre puisse être annulée en revenant à l’état d’équilibre perdu. Tandis que
l’équilibration suppose qu’en rétablissant l’équilibre perdu, quelque chose a été gagné. Il ne s’agit pas d’un retour, mais d’une avancée vers une forme plus complexe. Et c’est pourquoi l’équilibration est le moteur du développement.
Il existe une série de mécanismes psychologiques qui, quel que soit l’âge ou le niveau de développement, ne changent pas. Autrement dit, ils font toujours partie des processus de construction des connaissances.
Au contraire, tout au long du développement, nous trouvons différents niveaux ou capacités. Ces acquisitions, qualitativement et quantitativement différentes à chaque instant, sont le résultat de nouvelles organisations structurelles, de systèmes de connaissances de plus en plus complexes.
Pour identifier ou décrire les périodes du développement, Piaget parle de
« stades ou étapes », qui sont des moments relativement arbitraires. Même si les stades sont différents, les mécanismes qui produisent les changements sont toujours les mêmes.