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chap 2 grand III

III- L’illusion du moi

  1. La critique de la psychanalyse


La psychanalyse défend une vision déterministe de l’individu. 

déterminisme : tout est fait par des relations causales: il n’y a pas d’effet sans cause. De plus, les mêmes causes produisent les mêmes effets.


Sartre s’oppose à ça.

Sartre: philosophe et écrivain français du XXe siècle


 Pourquoi est-ce que nous sommes si enthousiastes dans notre acceptation des théories déterministes ? n'y aurait-il pas un intérêt caché ?


Pour Sartre, les explications psychanalytiques nous flattent car elle nous décharge de la responsabilité de nos actions =  légitiment tout.
Il défend le compatibilisme qui serait un déterminisme réel (on en voit plus après dans le cours).

Pour Sartre, si je ne crois pas au libre arbitre, je suis lâche.


exemple du mari voulant quitter sa femme : un homme soupçonne sa femme de le tromper, il est obsédé par cette idée. Mais il n'a rien de tangible, ce n'est qu'une impression. Un jour elle revient et il voit que dans sa poche il y a une lettre, il la lit donc pendant la nuit. Cette lettre venait en fait de sa sœur. Bizarrement il est très déçu plutôt que soulagé. Il va voir Freud.

Interprétation freudienne  : l'homme veut simplement quitter sa femme, il a le désir / l'intention inconsciente de quitter sa femme 

→ Cette idée dérange Sartre : est-ce que quelqu'un peut être malheureux
dans un couple sans le savoir ? Est-ce que ça existe vraiment une intention
inconsciente ?
 

→la notion d'intention inconsciente paraît contradictoire: une intention
est forcément consciente 

Théorie sartrienne alternative : nous sommes capables de “mauvaise foi” = on est capable de se mentir à soi-même 

→paradoxe du mensonge à soi-même : je suis à la fois le menteur et celui à qui
je mens celui qui connaît la vérité et celui à qui on la cache 

→ pour Sartre cela est possible grâce au déni 

→ Exemple de la jeune femme et du flirt, lettre est le néant, Sartre à la ligne une femme flirte avec un homme. Elle sait qu’il a des intentions physiques mais continue de se faire des films. Quand il lui prend la main, témoin de ses intentions pas intellectuelles quoi, elle est confrontée à la réalité.
→Un flirt est une discussion dans le contexte d'une attirance physique réciproque mais tacite : c'est ce qui fait que le flirt est plaisant, sans attraction physique le flirt perd sa spécificité. Si la nature sexuelle du flirt devient explicite, les deux personnes sont confrontées à un choix qui rompt la plaisance du flirt. 

Problème : le seul désir physique objectifie et la femme n'est plus un sujet pensant avec une personnalité mais seulement un objet.Ccela est presque humiliant : elle n’est plus respectée comme un individu conscient! (L'objectification peut de plus être désagréable si quelqu'un qui nous aime mais que l'on n'aime pas en retour ou si il y a un vieux mec creepy au coin de la rue qui mate une jeune fille en jupe). La femme parvient cependant à neutraliser l’objectifivcation en rentrant dans le déni et en se faisant des films.

→ Elle est entièrement libre mais sa liberté lui fait peur : elle fait peut-être le mauvais choix et elle devrait alors en accepter les conséquences → la responsabilité, ça pèse, c'est un fardeau : si ça fait mal, c'est de ma faute. 


Pour ça nous sommes capables de nous mentir à nous-mêmes et de regarder ailleurs.

Le déni c'est regarder ailleurs, ne pas se confronter à ce que l'on sait pourtant. 

Sartre montre que l'on peut se passer de l'hypothèse de l'inconscient.

la femme est au courant que la particularité du flirt est le désir il n'y a pas
d'intention inconsciente. 

→de même pour le mari : il doit faire le choix entre rester et être malheureux ou partir
et avoir aussi de la peine. Il n’assume pas sa liberté car elle entraînerait de la peine, il
cherche donc une excuse

⇒notre liberté est source d'angoisse car elle nous rend responsable de nos actes


⇒ Avec la théorie de Sartre, on possède le libre-arbitre

→ Pour Sartre, la théorie psychanalytique de l'inconscient toute entière est une excuse de mauvaise foi qui peut nous déresponsabiliser. 

→ Sapolsky, Determined : Neurologue et anthropologue, tentative de réfuter le libre arbitre, la responsabilité est le mérite individuel n'existent pas .


  1. A la recherche du moi


LE MOI PROFOND ET L’AMOUR ROMANTIQUE

  • La conception romantique de l'amour est en fait presque une relation d’âme à âme,une rencontre de deux intériorités qui vont forger un lien qui dépasse toute explication ou caractérisation.

  • Dans l'amour romantique, je connais le moi profond de l'autre, son essence : cela confirme la théorie des âmes sœurs 

Platon, les androgynes : des gens divisés en deux qui cherchent leur moitié


Blaise Pascal remet en cause cette conception de l'amour en disant :

“Nous n'aimons jamais personne mais seulement des qualités” - Pascal

qualité = caractéristiques : spécificités d'une personne, très distinctif spécifique (qualités comme défauts)


Pascal: physicien, mathématicien, philosophe et théologien français du XVIIe 


L’amour transcende-t-il vraiment les qualités?


  • Amour = sentiment de préférence, on préfère être avec quelqu'un que le reste du monde 

→ Or pour Pascal nous sommes nos qualités, on n'a pas de moi profond, si on enlève ça on n'est plus rien.Si on retire les déterminations propres à une personne, il nous reste une sorte d'archétype d'être humain, un archétype universel
⇒ on ne peut donc pas être objet d'amour c'est-à-dire un choix préférentiel si on est tous les mêmes

→ Dans ce cas-là, on est comme des oignons : on n’a pas de noyau mais seulement des couches empilées.


LES ARGUMENTS CONTRE L’EXISTENCE DU MOI


  • Argument du bouddhisme : Anatman = on n'a pas de moi

    • On distingue 5 agrégats = caractéristiques en nous : le corps, les sensations, les perceptions, les fabrication mentales (représentations, opinions, règles morales…), la conscience.

      • Le corps ne contient pas mon identité personnelle, ce n'est pas le moi. (cf. téléportation) 

      • les sensations sont déterminées par mon environnement et mes organes, donc ce n'est pas mon essence 

      • de même pour les perceptions 

      • Les fabrications mentales dépendent du vécu (on n'y a pas d'emprise), de notre société ⇒ ce n'est donc pas vraiment quelque chose de personnel 

      • la conscience = la présence à un extérieur et à soi (je regarde juste un arbre, je suis là) ⇒ ce n'est donc pas spécifiquement personnel.

Le moi n'est pas dans les agrégats, il n'y a donc rien de personnel en nous, on est juste l'assemblage d'agrégats.

⇒ L'illusion du moi est la propriété émergente de ces agrégats. Cela explique pourquoi on est malheureux dans le bouddhisme. On cherche une essence là où il n'y en a pas, on s'attache alors que rien ne nous appartient et tout est en changement (impermanence


  • Aujourd'hui le déterminisme dit justement que on est des gènes + la société/ l’environnement. Il n'y a donc rien de personnel. Dans le bouddhisme il y a quand même une marge de liberté car on peut se libérer de l'illusion et donc moins souffrir (mais en même temps il n'y a pas beaucoup de marge car on ne peut pas décider de se libérer)

→ Cette idée est développée par Hume: il est empiriste donc veut sentir son moi,
l'observer. Il essaie donc d'observer ses pensées. Il observe qu'on pense à des choses
particulières 

→ Pour Hume, on est dans un flux ininterrompu de pensées particulières, soit
des souvenirs, soit une anticipation du futur. Pour Hume, le moi est introuvable. ⇒ Si le moi est introuvable et on ne peut pas l'expérimenter cela veut dire qu'il n'existe pas ou du moins qu'ON PEUT S’EN PASSER


Si le moi n’existe pas, d’où vient cette illusion?


D'après Nietzsche, elle vient essentiellement du langage : 

  • Le langage est structuré par la grammaire qui nous donne les conditions d'une phrase bien construite. Elle nous impose de toujours relier des verbes (notamment d'action) à un sujet comme support. Or certains verbes n'ont pas de personne qui fasse quelque chose (exemples: il pleut, il fait chaud) →  fonctionne aussi dans d'autres langues comme l'espagnol ou le roumain car le sujet est mentionné dans la conjugaison.


Nietzsche: philosophe allemand d’origine polonaise du XIXe siècle.


→ Pour Nietzsche nous faisons un saut injustifié du sujet comme fonction grammaticale au sujet comme entité métaphysique (âme) et psychologique (moi) 

 

Est-ce qu'on est  les auteurs de nos pensées ? Dans quel contexte émergent les pensées ?

→ Non, on n'est pas les auteurs de nos pensées. Déjà, on ne peut pas se représenter la négation (« ne pense pas à un ours polaire rose » bah perdu) 

→  nos pensées sont spontanées (cf. Hume et flux ininterrompu) et il est donc difficile de les contrôler : elles émergent qu'on le veuille ou non  en nous. 
Alors, plutôt que de dire « je pense » comme si je le faisais délibérément, on devrait dire « ça pense » selon Nietzsche


 

  1. La conscience comme intentionnalité


Sartre - conscience et intentionnalité - texte

La conscience et  le monde sont donnés d’un même coup” = pour avoir qqch il faut qqch, sans monde il n’y a pas de conscience, et il faut que qqn ait la conscience qu’un monde existe pour qu’il existe. 


Alors que Descartes pensait la conscience comme un substance = comme un contenant (substance → chose → contenant), et que dans ce contenant se produiraient des pensées, et avait donc la vision de la conscience comme intériorité, Sartre pense qu’il faut changer de paradigme = modèle/représentation de la conscience. 

⇒ la conscience n’est pas une chose, pas une substance physique et certainement pas une boîte. 


Sartre va reprendre la définition de Husserl (philosophe allemand du début XXe), selon laquelle:
Toute conscience est consciente de qqch” - Husserl

→ la  conscience est avant tout présence, et pour être présent à qqch, il faut que ce qqch existe ⇒ La conscience, par définition et par essence, est entièrement tournée vers l’extérieur et le monde. C’est l'intentionnalité de la conscience.

métaphore de la gifle : une gifle (=conscience) présuppose qqn à gifler.

→ Pour Sartre et Husserl, la conscience se rapproche davantage d’un geste : c’est ma capacité à me rendre présent à ce qui est hors de moi. De plus, on peut sélectionner notre présence immédiate, ce dont on va avoir conscience = on a conscience de tout mais pas à la même force

ex de l’ami dans le café : on donne rdv à un ami dans un café. Quand on y arrive, on le cherche. On ne va pas observer chaque détail individuel de tout le monde autour, toute la conscience est dirigée vers notre ami et tout le reste est annulé ⇒ intentionnalité

⇒ Pour Sartre, on a la capacité de néantiser ce qu’il y a autour de nous.


De plus, la conscience n’existe pas indépendamment des choses vers lesquelles elle se projette (une gifle n’existe pas sans être donnée)....

conséquence : séparée des objets, la conscience est néant. C’est d'ailleurs parce qu’elle n’est rien qu’elle est capable de se tourner vers absolument tout dans notre expérience. 

→ la conscience est projet : elle est toujours lancée au devant de soi, en avant, elle est tournée vers l’extérieur.

→ la conscience réflexive est secondaire pour Sartre (différent de Descartes) car je n’ai conscience de moi que en temps où j’ai un rapport au monde extérieur, mon intériorité est liée à l’extérieur ⇒ la pure intériorité / conscience de soi n’existe pas.


Si la conscience est pur néant, je n’ai pas d’essence ni de nature → je n’ai pas de contraintes ⇒ je suis totalement libre.


  1. L’existence précède l’essence


voir déf essence

Quelle est l’essence de l’Homme?  A-t-il une nature, une essence?


De nombreux philosophes ont tenté de définir l’Homme 

→ exemple : “l’Homme est un animal rationnel” - Platon

→ dans le christianisme : péché originel : nous sommes des pécheurs, on est naturellement mauvais et tournés vers le vice, on serait biaisés, déterminés.

→ Dès que l’on pense à une nature / une essence, on pose un déterminisme (qu’on peut essayer d’éviter ou non)


Sartre - L’homme est condamné à être libre - TEXTE - L’existentialisme est un humanisme

→ si la conscience est néant, est pure présence, on ne peut pas la définir. 

→ cas où l’essence précède l’existence : coupe papier, stylo… toutes les inventions : l’essence du stylo est d’écrire, il est d’abord conçu intégralement pour cette fin avant même d’être produit → c’est son utilité, son but, donc il vient avant son existence. D’ailleurs quand le stylo remplit sa fonction, on le jette. 

→ nous, on ne peut pas être jetés si on n’accomplirait pas une fonction, qu’on n’a même pas 

→ Pour Sartre, le sujet pensant / conscient n’a pas de fonction à la naissance. C'est à nous de nous inventer des buts : c’est à nous de nous donner un sens à nos vies.


existentialisme : mouvement de Sartre dont le motto est “l’existence précède l’essence”. (Ici, l’existentialisme de Sartre présuppose l’athéisme et l’absence d’absolu)


“L’Homme est condamné à être libre” - Sartre

→ paradoxe de la formule : une condamnation est une privation de la liberté. On ne peut pas ne pas être libre, et on ne peut pas échapper à notre liberté

 → même quand on a un choix à faire, ne pas choisir c’est un choix. On est donc dans une décision libre. On ne peut pas échapper au choix.

→ l’essence de l’Homme est de ne pas avoir d’essence → ne pas avoir de nature → pas de déterminisme → liberté.

⇒ L’essence de l’Homme est la liberté. 



Sartre distingue 2 manières d'être, 2 rapports au monde.

L’EN-SOI : le mode d'être des objets, des choses = les choses ont une essence et une définition = nature = fonction 

identité : a = a. Les choses ce qu’elles qu'elles sont, elles sont entièrement
dans l'être [...] Elles n'ont pas de devenir ou de besoin de se réaliser. 

LE POUR-SOI : le mode d'être de la conscience, caractérisé par l'absence d’essence, de définition, de nature, de fonction prédéterminée → conscience = néant = rien donc elle est tournée vers les possibles = le devenir = ce qui change.
→ Elle n'est jamais identique à elle-même, elle n'est jamais dans l'identité, elle n'est
jamais dans la coïncidence à soi. 

→ le pour soi déborde toutes les catégories et attributions des identités 

→ « vous êtes des lycéens » : vrai maintenant mais progressivement on ne l'est plus → on ne peut pas nous figer 

exemple du garçon de café de Sartre : un garçon de café joue son rôle de manière excessive et essaye de ne faire qu’un avec cette fonction (toujours trop de formules de politesse, jargon...) 


L'absence d'identité et la liberté  produisent une situation d'angoisse car on est toujours en dialogue avec soi-même (je suis X mais j'en déborde toujours) 

Pour Sartre, le pour soi rêve de se faire en soi = la conscience rêve de se faire chose. On veut se définir grâce à des catégories qui vont nous donner une certaine solidité.

→ je nie ma liberté et donc potentiellement celle des autres en imposant des normes 

→ quand on nie notre liberté on débouche sur 2 attitudes : 

→ les excuses de mauvaise foi : → s'applique à moi seulement

« ce n'est pas de ma faute j'ai toujours été nul en maths »

→ mauvaise foi appliquée aux autres : on devient un « salaud » 


salaud : celui qui se prend au sérieux et qui croit qu'il a une mission dans la vie, une essence, une nature et qui pense que cela lui confère des droits. c'est celui qui oublie sa propre contingence, qu'il est le produit de circonstances

 → cela lui permet de se déresponsabiliser

  → ex : passer devant les autres dans la file en disant désolé moi je suis pressé

(Sartre parle avant tout de l'élite dominante = capitalistes et bourgeois, mais ce principe s'applique à tout le monde) 


Le goût de vivre et cent autres propos - André Comte-Sponville - texte

→ « qu'est-ce qu'un salaud ?  » 

→ il n'existe pas de salaud absolu car on ne naît pas mauvais (on n’a pas de nature à la naissance donc on ne peut pas être mauvais) 

“le salaud, c'est celui qui est prêt à sacrifier autrui à soi, à son propre intérêt, à ses propres désirs, à ses opinions ou à ses rêves. [...] celui qui oublie sa propre contingence, sa propre responsabilité, celui qui est persuadé de son bon droit, de sa bonne foi” - André Comte-Sponville 

→ cf égoïste de Schopenhauer un peu 

→ l'opposé du salaud n'est pas le saint, l'homme parfait, mais au contraire c'est l'un qui se sait à la fois contingent et coupable (car responsable), qui se sait égoïste et qui essaye de limiter cela 

 

« le salaud et celui qui, pour justifier son existence, feint d'ignorer la liberté et la contingence qui le caractérisent essentiellement en tant qu'homme » - Sartre, La Nausée


Le problème de la pensée abstraite


Hegel donne l'exemple d'un homme conduit à l'échafaud pour meurtre. Dans la foule qui yassiste, une femme s'écrit “ouais, il est quand même pas mal”. La foule est indignée. Alors, on a réduit le meurtrier à être un meurtrier.

Hegel = philosophe allemand du XVIIIe-XIXe surtout


Pour Hegel, l'abstraction, c'est figer des catégories à tout le monde 


L'abstraction a généralement une connotation positive : pour l'individu « de la rue » = simple, l’abstraction, c'est bien et c'est le rôle du philosophe. Mais Hegel veut prouver le contraire. 


Pour Hegel, ce sont les foules, les personnes pas éduquées qui pensent de manière abstraite car penser de manière abstraite c'est penser par des catégories / labels /étiquettes que l'on va prendre pour des absolus/  des essences

→ ici on veut réduire l'homme à un acte : le meurtre 

→ aujourd’hui catégorisation dans les médias car ça attire les auditoires

Au contraire, le philosophe va chercher plus loin (quelles sont les causes, quels sont sont les autres enjeux... ? ) 

→ un intellectuel est celui qui cherche à comprendre et pas à condamner. Comprendre ici implique de saisir la réalité concrète.

“Ni rire, ni pleurer , ni haïr, mais comprendre” - Spinoza


La théorie de Hegel rejoint tout à fait la théorie de Sartre selon laquelle il n’y a pas d’identité figée, pas d’essence, pas d’absolu.


chap 2 grand III

III- L’illusion du moi

  1. La critique de la psychanalyse


La psychanalyse défend une vision déterministe de l’individu. 

déterminisme : tout est fait par des relations causales: il n’y a pas d’effet sans cause. De plus, les mêmes causes produisent les mêmes effets.


Sartre s’oppose à ça.

Sartre: philosophe et écrivain français du XXe siècle


 Pourquoi est-ce que nous sommes si enthousiastes dans notre acceptation des théories déterministes ? n'y aurait-il pas un intérêt caché ?


Pour Sartre, les explications psychanalytiques nous flattent car elle nous décharge de la responsabilité de nos actions =  légitiment tout.
Il défend le compatibilisme qui serait un déterminisme réel (on en voit plus après dans le cours).

Pour Sartre, si je ne crois pas au libre arbitre, je suis lâche.


exemple du mari voulant quitter sa femme : un homme soupçonne sa femme de le tromper, il est obsédé par cette idée. Mais il n'a rien de tangible, ce n'est qu'une impression. Un jour elle revient et il voit que dans sa poche il y a une lettre, il la lit donc pendant la nuit. Cette lettre venait en fait de sa sœur. Bizarrement il est très déçu plutôt que soulagé. Il va voir Freud.

Interprétation freudienne  : l'homme veut simplement quitter sa femme, il a le désir / l'intention inconsciente de quitter sa femme 

→ Cette idée dérange Sartre : est-ce que quelqu'un peut être malheureux
dans un couple sans le savoir ? Est-ce que ça existe vraiment une intention
inconsciente ?
 

→la notion d'intention inconsciente paraît contradictoire: une intention
est forcément consciente 

Théorie sartrienne alternative : nous sommes capables de “mauvaise foi” = on est capable de se mentir à soi-même 

→paradoxe du mensonge à soi-même : je suis à la fois le menteur et celui à qui
je mens celui qui connaît la vérité et celui à qui on la cache 

→ pour Sartre cela est possible grâce au déni 

→ Exemple de la jeune femme et du flirt, lettre est le néant, Sartre à la ligne une femme flirte avec un homme. Elle sait qu’il a des intentions physiques mais continue de se faire des films. Quand il lui prend la main, témoin de ses intentions pas intellectuelles quoi, elle est confrontée à la réalité.
→Un flirt est une discussion dans le contexte d'une attirance physique réciproque mais tacite : c'est ce qui fait que le flirt est plaisant, sans attraction physique le flirt perd sa spécificité. Si la nature sexuelle du flirt devient explicite, les deux personnes sont confrontées à un choix qui rompt la plaisance du flirt. 

Problème : le seul désir physique objectifie et la femme n'est plus un sujet pensant avec une personnalité mais seulement un objet.Ccela est presque humiliant : elle n’est plus respectée comme un individu conscient! (L'objectification peut de plus être désagréable si quelqu'un qui nous aime mais que l'on n'aime pas en retour ou si il y a un vieux mec creepy au coin de la rue qui mate une jeune fille en jupe). La femme parvient cependant à neutraliser l’objectifivcation en rentrant dans le déni et en se faisant des films.

→ Elle est entièrement libre mais sa liberté lui fait peur : elle fait peut-être le mauvais choix et elle devrait alors en accepter les conséquences → la responsabilité, ça pèse, c'est un fardeau : si ça fait mal, c'est de ma faute. 


Pour ça nous sommes capables de nous mentir à nous-mêmes et de regarder ailleurs.

Le déni c'est regarder ailleurs, ne pas se confronter à ce que l'on sait pourtant. 

Sartre montre que l'on peut se passer de l'hypothèse de l'inconscient.

la femme est au courant que la particularité du flirt est le désir il n'y a pas
d'intention inconsciente. 

→de même pour le mari : il doit faire le choix entre rester et être malheureux ou partir
et avoir aussi de la peine. Il n’assume pas sa liberté car elle entraînerait de la peine, il
cherche donc une excuse

⇒notre liberté est source d'angoisse car elle nous rend responsable de nos actes


⇒ Avec la théorie de Sartre, on possède le libre-arbitre

→ Pour Sartre, la théorie psychanalytique de l'inconscient toute entière est une excuse de mauvaise foi qui peut nous déresponsabiliser. 

→ Sapolsky, Determined : Neurologue et anthropologue, tentative de réfuter le libre arbitre, la responsabilité est le mérite individuel n'existent pas .


  1. A la recherche du moi


LE MOI PROFOND ET L’AMOUR ROMANTIQUE

  • La conception romantique de l'amour est en fait presque une relation d’âme à âme,une rencontre de deux intériorités qui vont forger un lien qui dépasse toute explication ou caractérisation.

  • Dans l'amour romantique, je connais le moi profond de l'autre, son essence : cela confirme la théorie des âmes sœurs 

Platon, les androgynes : des gens divisés en deux qui cherchent leur moitié


Blaise Pascal remet en cause cette conception de l'amour en disant :

“Nous n'aimons jamais personne mais seulement des qualités” - Pascal

qualité = caractéristiques : spécificités d'une personne, très distinctif spécifique (qualités comme défauts)


Pascal: physicien, mathématicien, philosophe et théologien français du XVIIe 


L’amour transcende-t-il vraiment les qualités?


  • Amour = sentiment de préférence, on préfère être avec quelqu'un que le reste du monde 

→ Or pour Pascal nous sommes nos qualités, on n'a pas de moi profond, si on enlève ça on n'est plus rien.Si on retire les déterminations propres à une personne, il nous reste une sorte d'archétype d'être humain, un archétype universel
⇒ on ne peut donc pas être objet d'amour c'est-à-dire un choix préférentiel si on est tous les mêmes

→ Dans ce cas-là, on est comme des oignons : on n’a pas de noyau mais seulement des couches empilées.


LES ARGUMENTS CONTRE L’EXISTENCE DU MOI


  • Argument du bouddhisme : Anatman = on n'a pas de moi

    • On distingue 5 agrégats = caractéristiques en nous : le corps, les sensations, les perceptions, les fabrication mentales (représentations, opinions, règles morales…), la conscience.

      • Le corps ne contient pas mon identité personnelle, ce n'est pas le moi. (cf. téléportation) 

      • les sensations sont déterminées par mon environnement et mes organes, donc ce n'est pas mon essence 

      • de même pour les perceptions 

      • Les fabrications mentales dépendent du vécu (on n'y a pas d'emprise), de notre société ⇒ ce n'est donc pas vraiment quelque chose de personnel 

      • la conscience = la présence à un extérieur et à soi (je regarde juste un arbre, je suis là) ⇒ ce n'est donc pas spécifiquement personnel.

Le moi n'est pas dans les agrégats, il n'y a donc rien de personnel en nous, on est juste l'assemblage d'agrégats.

⇒ L'illusion du moi est la propriété émergente de ces agrégats. Cela explique pourquoi on est malheureux dans le bouddhisme. On cherche une essence là où il n'y en a pas, on s'attache alors que rien ne nous appartient et tout est en changement (impermanence


  • Aujourd'hui le déterminisme dit justement que on est des gènes + la société/ l’environnement. Il n'y a donc rien de personnel. Dans le bouddhisme il y a quand même une marge de liberté car on peut se libérer de l'illusion et donc moins souffrir (mais en même temps il n'y a pas beaucoup de marge car on ne peut pas décider de se libérer)

→ Cette idée est développée par Hume: il est empiriste donc veut sentir son moi,
l'observer. Il essaie donc d'observer ses pensées. Il observe qu'on pense à des choses
particulières 

→ Pour Hume, on est dans un flux ininterrompu de pensées particulières, soit
des souvenirs, soit une anticipation du futur. Pour Hume, le moi est introuvable. ⇒ Si le moi est introuvable et on ne peut pas l'expérimenter cela veut dire qu'il n'existe pas ou du moins qu'ON PEUT S’EN PASSER


Si le moi n’existe pas, d’où vient cette illusion?


D'après Nietzsche, elle vient essentiellement du langage : 

  • Le langage est structuré par la grammaire qui nous donne les conditions d'une phrase bien construite. Elle nous impose de toujours relier des verbes (notamment d'action) à un sujet comme support. Or certains verbes n'ont pas de personne qui fasse quelque chose (exemples: il pleut, il fait chaud) →  fonctionne aussi dans d'autres langues comme l'espagnol ou le roumain car le sujet est mentionné dans la conjugaison.


Nietzsche: philosophe allemand d’origine polonaise du XIXe siècle.


→ Pour Nietzsche nous faisons un saut injustifié du sujet comme fonction grammaticale au sujet comme entité métaphysique (âme) et psychologique (moi) 

 

Est-ce qu'on est  les auteurs de nos pensées ? Dans quel contexte émergent les pensées ?

→ Non, on n'est pas les auteurs de nos pensées. Déjà, on ne peut pas se représenter la négation (« ne pense pas à un ours polaire rose » bah perdu) 

→  nos pensées sont spontanées (cf. Hume et flux ininterrompu) et il est donc difficile de les contrôler : elles émergent qu'on le veuille ou non  en nous. 
Alors, plutôt que de dire « je pense » comme si je le faisais délibérément, on devrait dire « ça pense » selon Nietzsche


 

  1. La conscience comme intentionnalité


Sartre - conscience et intentionnalité - texte

La conscience et  le monde sont donnés d’un même coup” = pour avoir qqch il faut qqch, sans monde il n’y a pas de conscience, et il faut que qqn ait la conscience qu’un monde existe pour qu’il existe. 


Alors que Descartes pensait la conscience comme un substance = comme un contenant (substance → chose → contenant), et que dans ce contenant se produiraient des pensées, et avait donc la vision de la conscience comme intériorité, Sartre pense qu’il faut changer de paradigme = modèle/représentation de la conscience. 

⇒ la conscience n’est pas une chose, pas une substance physique et certainement pas une boîte. 


Sartre va reprendre la définition de Husserl (philosophe allemand du début XXe), selon laquelle:
Toute conscience est consciente de qqch” - Husserl

→ la  conscience est avant tout présence, et pour être présent à qqch, il faut que ce qqch existe ⇒ La conscience, par définition et par essence, est entièrement tournée vers l’extérieur et le monde. C’est l'intentionnalité de la conscience.

métaphore de la gifle : une gifle (=conscience) présuppose qqn à gifler.

→ Pour Sartre et Husserl, la conscience se rapproche davantage d’un geste : c’est ma capacité à me rendre présent à ce qui est hors de moi. De plus, on peut sélectionner notre présence immédiate, ce dont on va avoir conscience = on a conscience de tout mais pas à la même force

ex de l’ami dans le café : on donne rdv à un ami dans un café. Quand on y arrive, on le cherche. On ne va pas observer chaque détail individuel de tout le monde autour, toute la conscience est dirigée vers notre ami et tout le reste est annulé ⇒ intentionnalité

⇒ Pour Sartre, on a la capacité de néantiser ce qu’il y a autour de nous.


De plus, la conscience n’existe pas indépendamment des choses vers lesquelles elle se projette (une gifle n’existe pas sans être donnée)....

conséquence : séparée des objets, la conscience est néant. C’est d'ailleurs parce qu’elle n’est rien qu’elle est capable de se tourner vers absolument tout dans notre expérience. 

→ la conscience est projet : elle est toujours lancée au devant de soi, en avant, elle est tournée vers l’extérieur.

→ la conscience réflexive est secondaire pour Sartre (différent de Descartes) car je n’ai conscience de moi que en temps où j’ai un rapport au monde extérieur, mon intériorité est liée à l’extérieur ⇒ la pure intériorité / conscience de soi n’existe pas.


Si la conscience est pur néant, je n’ai pas d’essence ni de nature → je n’ai pas de contraintes ⇒ je suis totalement libre.


  1. L’existence précède l’essence


voir déf essence

Quelle est l’essence de l’Homme?  A-t-il une nature, une essence?


De nombreux philosophes ont tenté de définir l’Homme 

→ exemple : “l’Homme est un animal rationnel” - Platon

→ dans le christianisme : péché originel : nous sommes des pécheurs, on est naturellement mauvais et tournés vers le vice, on serait biaisés, déterminés.

→ Dès que l’on pense à une nature / une essence, on pose un déterminisme (qu’on peut essayer d’éviter ou non)


Sartre - L’homme est condamné à être libre - TEXTE - L’existentialisme est un humanisme

→ si la conscience est néant, est pure présence, on ne peut pas la définir. 

→ cas où l’essence précède l’existence : coupe papier, stylo… toutes les inventions : l’essence du stylo est d’écrire, il est d’abord conçu intégralement pour cette fin avant même d’être produit → c’est son utilité, son but, donc il vient avant son existence. D’ailleurs quand le stylo remplit sa fonction, on le jette. 

→ nous, on ne peut pas être jetés si on n’accomplirait pas une fonction, qu’on n’a même pas 

→ Pour Sartre, le sujet pensant / conscient n’a pas de fonction à la naissance. C'est à nous de nous inventer des buts : c’est à nous de nous donner un sens à nos vies.


existentialisme : mouvement de Sartre dont le motto est “l’existence précède l’essence”. (Ici, l’existentialisme de Sartre présuppose l’athéisme et l’absence d’absolu)


“L’Homme est condamné à être libre” - Sartre

→ paradoxe de la formule : une condamnation est une privation de la liberté. On ne peut pas ne pas être libre, et on ne peut pas échapper à notre liberté

 → même quand on a un choix à faire, ne pas choisir c’est un choix. On est donc dans une décision libre. On ne peut pas échapper au choix.

→ l’essence de l’Homme est de ne pas avoir d’essence → ne pas avoir de nature → pas de déterminisme → liberté.

⇒ L’essence de l’Homme est la liberté. 



Sartre distingue 2 manières d'être, 2 rapports au monde.

L’EN-SOI : le mode d'être des objets, des choses = les choses ont une essence et une définition = nature = fonction 

identité : a = a. Les choses ce qu’elles qu'elles sont, elles sont entièrement
dans l'être [...] Elles n'ont pas de devenir ou de besoin de se réaliser. 

LE POUR-SOI : le mode d'être de la conscience, caractérisé par l'absence d’essence, de définition, de nature, de fonction prédéterminée → conscience = néant = rien donc elle est tournée vers les possibles = le devenir = ce qui change.
→ Elle n'est jamais identique à elle-même, elle n'est jamais dans l'identité, elle n'est
jamais dans la coïncidence à soi. 

→ le pour soi déborde toutes les catégories et attributions des identités 

→ « vous êtes des lycéens » : vrai maintenant mais progressivement on ne l'est plus → on ne peut pas nous figer 

exemple du garçon de café de Sartre : un garçon de café joue son rôle de manière excessive et essaye de ne faire qu’un avec cette fonction (toujours trop de formules de politesse, jargon...) 


L'absence d'identité et la liberté  produisent une situation d'angoisse car on est toujours en dialogue avec soi-même (je suis X mais j'en déborde toujours) 

Pour Sartre, le pour soi rêve de se faire en soi = la conscience rêve de se faire chose. On veut se définir grâce à des catégories qui vont nous donner une certaine solidité.

→ je nie ma liberté et donc potentiellement celle des autres en imposant des normes 

→ quand on nie notre liberté on débouche sur 2 attitudes : 

→ les excuses de mauvaise foi : → s'applique à moi seulement

« ce n'est pas de ma faute j'ai toujours été nul en maths »

→ mauvaise foi appliquée aux autres : on devient un « salaud » 


salaud : celui qui se prend au sérieux et qui croit qu'il a une mission dans la vie, une essence, une nature et qui pense que cela lui confère des droits. c'est celui qui oublie sa propre contingence, qu'il est le produit de circonstances

 → cela lui permet de se déresponsabiliser

  → ex : passer devant les autres dans la file en disant désolé moi je suis pressé

(Sartre parle avant tout de l'élite dominante = capitalistes et bourgeois, mais ce principe s'applique à tout le monde) 


Le goût de vivre et cent autres propos - André Comte-Sponville - texte

→ « qu'est-ce qu'un salaud ?  » 

→ il n'existe pas de salaud absolu car on ne naît pas mauvais (on n’a pas de nature à la naissance donc on ne peut pas être mauvais) 

“le salaud, c'est celui qui est prêt à sacrifier autrui à soi, à son propre intérêt, à ses propres désirs, à ses opinions ou à ses rêves. [...] celui qui oublie sa propre contingence, sa propre responsabilité, celui qui est persuadé de son bon droit, de sa bonne foi” - André Comte-Sponville 

→ cf égoïste de Schopenhauer un peu 

→ l'opposé du salaud n'est pas le saint, l'homme parfait, mais au contraire c'est l'un qui se sait à la fois contingent et coupable (car responsable), qui se sait égoïste et qui essaye de limiter cela 

 

« le salaud et celui qui, pour justifier son existence, feint d'ignorer la liberté et la contingence qui le caractérisent essentiellement en tant qu'homme » - Sartre, La Nausée


Le problème de la pensée abstraite


Hegel donne l'exemple d'un homme conduit à l'échafaud pour meurtre. Dans la foule qui yassiste, une femme s'écrit “ouais, il est quand même pas mal”. La foule est indignée. Alors, on a réduit le meurtrier à être un meurtrier.

Hegel = philosophe allemand du XVIIIe-XIXe surtout


Pour Hegel, l'abstraction, c'est figer des catégories à tout le monde 


L'abstraction a généralement une connotation positive : pour l'individu « de la rue » = simple, l’abstraction, c'est bien et c'est le rôle du philosophe. Mais Hegel veut prouver le contraire. 


Pour Hegel, ce sont les foules, les personnes pas éduquées qui pensent de manière abstraite car penser de manière abstraite c'est penser par des catégories / labels /étiquettes que l'on va prendre pour des absolus/  des essences

→ ici on veut réduire l'homme à un acte : le meurtre 

→ aujourd’hui catégorisation dans les médias car ça attire les auditoires

Au contraire, le philosophe va chercher plus loin (quelles sont les causes, quels sont sont les autres enjeux... ? ) 

→ un intellectuel est celui qui cherche à comprendre et pas à condamner. Comprendre ici implique de saisir la réalité concrète.

“Ni rire, ni pleurer , ni haïr, mais comprendre” - Spinoza


La théorie de Hegel rejoint tout à fait la théorie de Sartre selon laquelle il n’y a pas d’identité figée, pas d’essence, pas d’absolu.